Anne Hidalgo : l’Europe est l’instrument de notre souveraineté !

A l’approche du scrutin présidentiel, Anne Hidalgo a accepté de répondre aux questions de Sauvons l’Europe sur sa vision de la construction commune.

 

L’Union européenne a lancé le 9 mai une vaste consultation sur l’avenir de l’Europe. Quel avenir pour l’Europe ? Pour sa démocratie ?

« La France est notre patrie, l’Europe est notre avenir ». Cette phrase sonne aussi juste aujourd’hui qu’en 1987, lorsque François Mitterrand l’avait prononcée.

Pour la France et les Français, l’Union européenne est avant tout un puissant levier d’action pour maîtriser notre avenir collectif face aux grands défis auxquels tous les Européens sont confrontés : conflits armés, changement climatique et crise de la biodiversité, crises sanitaires, influence des multinationales et notamment des géants du numérique.

C’est aujourd’hui l’instrument de notre souveraineté. La crise sanitaire et la guerre en Ukraine l’ont clairement démontré. L’Europe a permis de rendre le vaccin accessible à chaque citoyen européen dans un temps record. Elle s’est aussi unie et mobilisée pour soutenir l’Ukraine en armes et en ressources face à l’invasion russe. Parce que l’Europe doit protéger.

Faire l’Europe c’est aussi une méthode : celle du compromis. L’Europe est un espace politique à investir, où il faut dialoguer avec tous, agir avec conviction, volonté et détermination mais sans arrogance. L’Union doit devenir plus démocratique et plus efficace pour mieux répondre aux aspirations des citoyens. Il faudra ainsi que le Parlement européen puisse avoir le dernier mot pour l’adoption d’une directive ou d’un règlement, à condition d’obtenir une majorité qualifiée des deux tiers. Les droits d’interpellation des citoyens devront également être renforcés. En parallèle, la politique européenne de la France elle-même doit devenir moins verticale et plus démocratique. Je prononcerai un discours annuel sur l’Union européenne devant le Parlement réuni en congrès.

 

L’Europe a déçu en matière sociale. Est-elle à la hauteur dans son action environnementale, dans la défense des données personnelles ? Quelles sont les nouvelles frontières ?

Aujourd’hui, l’univers numérique est largement dominé par des géants comme Google, Amazon, Microsoft ou Alibaba. Pour se faire une idée, les GAFAM ont engrangé 75 milliards de dollars de profits pour 331 milliards de chiffre d’affaires au deuxième trimestre 2021. Le constat est simple, un pays seul n’aurait que très peu de poids dans un rapport de force engagé avec ces entreprises.

L’Union européenne doit être l’instrument de notre souveraineté par une collaboration entre Etats membres. Nous devons nous unir, agir ensemble, ne pas nous replier derrière nos frontières nationales respectives au risque de l’impuissance et de la dépendance vis-à-vis d’acteurs qui n’ont ni les mêmes intérêts, ni les mêmes valeurs en vue notamment de faire naître un ou plusieurs géants européens. L’expérimentation du moteur de Recherche QWANT est intéressante mais elle reste infime sans une véritable volonté européenne.

Nous devons concevoir une stratégie nationale et européenne de développement de la crypto-monnaie. Elle provoque beaucoup d’instabilité mais nous ne devons pas pour autant passer à côté de cette modernité.
En parallèle, il est nécessaire de s’associer dans un cadre communautaire, à l’échelle de l’Union européenne pour la transition numérique. Un marché commun efficace et prospère suppose une harmonisation des législations nationales et l’adoption d’un cadre réglementaire européen quant à la gestion des crypto-monnaies et de la blockchain. Cet effort nous permettra de peser face aux marchés extra-européens. Ces nouvelles technologies offrent également de nouvelles potentialités en matière de protection environnementale.

Je ne veux pas d’une diplomatie climatique qui exclut. Trop longtemps, au niveau international ou national, la solidarité est restée le parent pauvre des politiques climatiques.

Nous Européens, nous devons nous engager à aider les pays moins développés à continuer à se développer sans polluer. Il faut que les engagements soient tenus, qu’il y ait une vraie volonté et que derrière ces montants résident de vraies aides et non le verdissement d’aides que nous effectuons déjà. Il faut que pour l’ensemble des aides au développement le critère environnemental soit déterminant.

Je souhaite aussi que notre législation européenne en matière de protection de l’environnement serve de modèle au reste du monde et singulièrement à la Chine et à l’Inde. Et lorsque la Chine augmente ses standards, cela a un impact sur le niveau mondial d’émission. Je pense aussi à leurs investissements à l’étranger, comme en Afrique. Leur responsabilité est grande pour réussir cette révolution.

Enfin, je souhaite la création d’un Tribunal pénal international contre les crimes d’écocide et mettre ainsi les demandes de justice climatique, légitimes, sur le devant de la scène.

 

Le présent quinquennat est né sous les auspices de l’Europe et de l’écologie, avant de voir la question de la sécurité et de l’identité prendre l’ascendant. Comment se prémunir d’une telle dérive à l’avenir ?

En faisant gagner partout en Europe la social-démocratie : Pedro Sanchez en Espagne,  Antonio Costa au Portugal et Olaf Scholz en Allemagne ont démontré leur capacité à rassembler pour gouverner. Leur méthode, que je partage, est moderne et sérieuse : privilégier le dialogue social, le travail avec les territoires, collectivités, associations, entreprises, citoyens. Ils rassemblent plus qu’ils ne divisent pour permettre aux vrais sujets d’exister dans le débat national et européen.

Certains ont pensé que l’écologie politique seule pouvait être la force de rassemblement. D’autres, bien plus dangereux, provenant des extrêmes, ont pensé pouvoir profiter de la crise pour arriver à gouverner. Mais leur bulle a éclaté et là aussi on constate que partout en Europe, seule la social-démocratie arrive à gouverner et nous prémunir des dérives sécuritaires et identitaires.

 

Sur quelles forces vives s’appuie votre candidature à l’élection présidentielle ? Y’a-t-il une France du partage et de la solidarité à mobiliser pour 2022 ?

Je suis candidate à l’élection présidentielle, mais je suis et je reste maire. Les élus locaux, et peut-être plus encore nous les maires, nous connaissons les préoccupations quotidiennes de nos concitoyens et nous y apportons des solutions concrètes. Des petits tracas du coin de la rue aux enjeux planétaires, nous sommes ceux qui sont présents sur le terrain, en première ligne, pour écouter les besoins des Français, pour prendre le pouls du pays et tout faire pour finalement changer la vie par une action de proximité.

Cet attachement à la proximité, c’est à la fois la force et l’honneur de notre mandat d’élu local et l’idée forte qui infuse tout mon programme présidentiel. Voilà pourquoi j’ai décidé de m’entourer dès le début de cette campagne d’une équipe de France des maires.

Soutenez notre action !

Sauvons l'Europe doit son indépendance éditoriale à un site Internet sans publicité et grâce à l’implication de ses rédacteurs bénévoles. Cette liberté a un coût, notamment pour les frais de gestion du site. En parallèle d’une adhésion à notre association, il est possible d’effectuer un don. Chaque euro compte pour défendre une vision europrogressiste !

Articles du même auteur

13 Commentaires

  1. Bravo Anne, merci !!! Dire qu’on aurait pu tellement faire dès 2012 avec plus de volonté politique…Enfin c’est le passé, ayons confiance en l’avenir malgré tout, et au nécessaire rééquilibrage des politiques nationales et européenne vers la social-démocratie pour inverser la tendance du creusement des inégalités et réussir la transition écologique.

  2. Non Madame Hidalgo. L’Europe n’est pas un instrument, fut-ce celui de notre souveraineté. Et notre souveraineté à qui ? À nous Français ou à nous Européens ? Car nous, les Européens, formons un « demos » lorsque nous élisons notre parlement et déjà un peuple, beaucoup plus solidaire que certains le croient. Notre avenir, comme disait François Mitterrand, oui ; mais notre avenir commun. Nous Européens avons une communauté de destin.
    Et que peut bien vouloir dire « faire l’Europe » en 2021 ? Quand cesserons-nous de « faire l’Europe » ? « Faire l’Europe » est-ce quelque chose comme « faire le clown » ? Il est grand temps de conclure, non ? Dans la continuité de la Conférence sur l’avenir de l’Europe, l’Union européenne doit devenir au plus vite une Union fédérale. N’ayons pas peur du mot. C’est le seul moyen de rendre l’UE complètement démocratique et… souveraine.

  3. L’Europe, instrument de la souveraineté de la France? Idée bizarroïde. L’Europe telle qu’elle est aujourd’hui et telle qu’elle sera un jour, fédérale, espérons-le entraîne des abandons de souveraineté nationale (et nationaliste).
    Ce texte, rédigé par des plumes spécialisées dans le copié-collé (les cryptomonnaies…) n’a strictement aucun intérêt si ce n’est, théoriquement, de faire risette aux Européens en envoyant quelques pages de banalités à Sauvons l’Europe.
    Je ne savais pas que les ambulances distribuaient des tracts…

    • Nous sommes bien d’accord. Sauf que dans une fédération européenne, il ne s’agirait pas d’un ABANDON de souveraineté mais d’un exercice en commun de celle(s)-ci.
      Si cette candidate (ou celle de LR, ou presque tous les autres candidats) était malencontreusement élue, nous entrerions dans un hiver de l’UE dont elle ne se remettrait pas. Les événements que nous traversons (pandémie, guerre en Ukraine et d’autres moins médiatisés) indiquent clairement qu’il ne faut plus attendre pour achever ce qui a été commencé il y a tout de même maintenant déjà 72 ans !
      N’est-il pas étrange par ailleurs que lors des élections européennes on ne parle pratiquement que des politiques nationales et que lors des élections nationales la plupart des candidats ne parlent pratiquement pas de l’Europe sinon en utilisant des « éléments de langage » sans la moindre inspiration ?

      • En effet,le ressort de la construction européenne peut s’analyser davantage comme un PARTAGE, plutôt qu’un ABANDON, de souveraineté.

        Du reste, l’article 1er de la constitution française attribue le concept d’indivisibilité à la République, non à la souveraineté. Et l’article 3 de la même constitution précise que la souveraineté appartient au peuple, qui – en plus de la voie référendaire – l’exerce par ses représentants. Peut-on alors dénier aux députés français au Parlement européen la qualité de « représentants » du peuple… et, comme tels, participant à l’exercice de cette souveraineté ?

        • Partage, si vous le voulez, mais il n’y a pas de monnaie commune sans abandon de souveraineté nationale (parlez-en à la Banque de France), pas de défense européenne sans abandon (par étapes, lentement) de la souveraineté (article 42-7 équivalent à l’article 5 du TAN), article 17 sur les pouvoirs de la Commission…
          Parler d’abandon de la souveraineté nationale est un chiffon rouge, agité avec enthousiasme par une partie de la droite et l’extrême-droite et LFI donc parlons de partage dans un cadre fédéral, mais n’est-ce pas un peu hypocrite du moins en ce qui concerne les fonctions régaliennes d’une futur UFE?

  4. Il existe une large liberté de ton et de pensée sur ce site et nous nous en félicitons. Cependant, il ne faut pas dépasser les frontières de l’inacceptable. Les propos antisémites ne seront évidemment pas tolérés. En conséquence, il est inutile d’expliquer en quoi votre commentaire est ignoble.

    • Sébastien, il faut réguler ce site. Ce genre de propos ignoble, qui n’est d’ailleurs pas seulement antisémite, ne peut pas continuer d’être diffusé passivement par nos soins. La liberté de pensée est ce qu’elle est, mais la liberté d’expression ne permet pas pour autant les ignominies.

    • Tout à fait d’accord avec votre réponse, cher Sébastien.

      On peut simplement rappeler que ce genre de divagation « hors-sol » et résolument « fakiste » ( au sens de « fake » news) émanant du même troll – dissimulé sous un pseudonyme qui, sans doute, n’amuse que lui – avait déjà été formulé en termes voisins en guise de commentaire consécutif à un précédent article publié sur le site de Sauvons l’Europe. Fort heureusement, avec SLE, et même sans qu’il soit nécessaire de recourir à la censure, ce fakisme tellement grossier – mais, après tout, la parabole de la paille et de la poutre est loin d’avoir perdu de sa pertinence – ne passera pas auprès des partisans et promoteurs d’une Europe de progrès..

      Cela dit, le commentaire de l’intéressé présente au moins un avantage « historique » de nos jours: celui de faire prendre conscience aux générations qui ne l’ont pas connue de ce qu’a pu représenter la logorrhée maladive de la propagande stalinienne.

  5. C’est bien de parler décentralisation et proximité, mais le découpage régional mis en place par le PS ne tenant compte que des (quelques grands) élus et ignorant les populations comme l’a fait la droite sous Michel Debré…me révolte. Je suis né Nantais (et Breton) en 1944 et ‘y ai vécu jusqu’en 1976.

    • Bravo ! Ceci est rarement exprimé. Je suis bien d’accord avec vous. Pour ma part, toujours très européen et social-démocrate, je me suis détourné de ce PS depuis juin 2014 pour la raison que vous évoquez. Peut-être sommes-nous un certain nombre dans ce cas !
      Madame Hidalgo nous dit que les gouvernants sociaux-démocrates européens gouvernent « en privilégiant le dialogue social, le travail avec les territoires, collectivités, associations, entreprises, citoyens »… Chez nous, je veux dire en France tout en pensant particulièrement à la Bretagne puisque c’est ma province, il y a eu un énorme espoir avec le discours de Manuel Valls début 2014 puis les territoires ont une nouvelle fois été reformatés en fonction des sollicitudes et des amitiés au sein du clan PS. Alors il y a en retour du désintérêt et de l’abstention (cf les régionales).
      Je suis breton du 44. J’ai signé une pétition papier pour être consulté dans le cadre de la loi NOTRe. Comme moi, 105 000 électeurs de Loire-Atlantique ont signé cette pétition (nom, prénom, date de naissance et adresse), plus de 10% des électeurs du 44. En fin d’année 2018 elle a été remise au Conseil départemental (majorité PS) et puis : RIEN !

      Espérons mieux dans une Europe plus unie, plus forte, plus fédérale !

      En attendant, pour étayer mon propos je mets c-après copie d’un message envoyé en février 2019 au maire de ma commune :

      « Au cours des 46 années écoulées, il y a eu dans Nantes et en Loire-Atlantique de nombreuses manifestations, toujours calmes et bon enfant, pour réclamer la réunification de la Bretagne historique. Des manifestations avec souvent une foule immense comme par trois fois en 2014. Il n’en a jamais été tenu compte. En décembre 2018 une pétition sur papier qui a recueilli la signature de 105 000 personnes électrices de Loire-Atlantique sur ce sujet a été déposée au Conseil Départemental. Est-il envisagé de faire encore une fois comme si rien ne s’était passé ? Comment faire alors pour que cette cause soit pacifiquement entendue ?
      La régionalisation de 1972 ne devait être qu’administrative. Or, depuis, l’intercommunication entre les cinq départements bretons a été rompue. Ici, France3 informe sur tout sauf sur les quatre autres départements. Certes avec le satellite il est possible d’avoir des informations sur les 4/5ème restants de la Bretagne mais alors c’est rien sur la Loire-Atlantique ! Avec les journaux, c’est la même chose : à 20 km du Morbihan notre tirage local ne fait pas de secret sur le fait divers à Laval, etc… (2 pages !) mais rien sur le restant de la Bretagne (i.e. pas une page !). Est-ce normal ?
      Dans le même temps des cabinets conseil nous inventent du « ligériens » (comme à Saint-Étienne, quel génie !), des logos et des drapeaux « modernes » comme à Montoir de Bretagne ou Saint-Nazaire. Les impôts servent à ça aussi. Ils servent aussi à gommer : sur l’actuelle préfecture à Nantes l’inscription monumentale « Chambre des comptes de Bretagne » a été ôtée de ce bâtiment classé, côté quai Ceineray, par les autorités départementales au milieu des années 80. Est-ce normal ? Peut-on imaginer une telle action sur le Parlement à Rennes sous prétexte d’un changement d’affectation du bâtiment ?
      Il y a beaucoup à dire. Respectons ensemble les territoires avec leur culture et leur histoire comme le jardinier entretient son terreau pour un bon enracinement et un bon développement. Le jardinier passe. Le jardin reste ! »

  6. Bonjout.

    On peut discuter de tout et de rien, nos politiques, nos dirigeants (nationaux et européens) le savent bien, les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent ?

    Tant que la construction de la nation européenne ne sera pas faîtes, en étant indépendante des influences des autres puissances dont les USA, nous ne serons pas crédible ?

    A quoi bon parler d’écologie au niveau national quand dans d’autre pays on polluent sans limite, a quoi bon parler de défense commune quand on achète du matériel américain au détriment de l’industrie européenne, etc, etc,…..

    Soyons sérieux, seule une nation européenne unie, souveraine, forte et indépendante sera la garante pour réussir les défis lié à la défense commune, à l’écologie, etc, etc,…

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

A lire également