Alors que débute le congrès du SPD qui doit trancher sa ligne, Sébastien Poupon nous éclaire sur ses enjeux à travers le premier round du congrès qu’à été le week-end dernier la défaite d’Olaf Sholz à la tête du parti, alors qu’il était grand favori. S’agit-il pour ce grand parti d’un prurit de gauchisme, ou d’un retour relatif à l’équilibre?
La victoire du duo Norbert Walter Borjans/Saskia Esken sur leurs adversaires Olaf Scholz/Klara Geywitz lors de l’élection à la présidence du SPD constitue un événement majeur susceptible d’avoir d’importantes conséquences sur la vie politique allemande. Ce n’est toutefois pas le tremblement de terre annoncé par une presse toujours prompte à exagérer les choses. D’abord parce que, contrairement à ce qui est inlassablement répété, ce succès ne constitue en rien une surprise : il était prévisible dès le soir du premier tour si l’on se donnait la peine de sérieusement étudier les potentiels reports de voix. Mais aussi et surtout parce que si NoWaBo et Esken sont effectivement issus de l’aile gauche du parti, ce sont davantage des sociaux démocrates « mainstream » désireux de revenir aux fondamentaux de la social démocratie que des radicaux prêts à renverser la table: ni l’un ni l’autre ne sont des « Corbyn allemands » et le fait qu’ils soient présentés comme des gauchistes forcenés en dit surtout long quand à la dérive idéologique de l’ancien chancelier Schröder et de ses amis.
L’évolution est somme toute logique : si l’on prend en considération les plates formes publiées ces dernières années par les Sociaux Démocrates, on se rend bien compte qu’elles traduisaient déjà une inflexion vers la gauche ainsi qu’une rupture, certes lente et progressive mais bien réelle, vis-à-vis des compromissions néo libérales de l’ère « Schröderienne » avec ses lois Hartz. Toutefois, les candidats à la chancellerie restant les proches de Schröder et l’appartenance à la GroKo contribuant à brouiller les lignes, ces changements de cap restaient invisibles aux yeux de l’électorat ou encore apparaissaient comme étant simplement opportunistes. L’arrivée aux responsabilités du duo NoWaBo/Esken devrait donc enfin mettre définitivement en évidence ce retour des valeurs sociales démocrates au sein du SPD.
Reste l’épineux problème de la GroKo. La nouvelle direction ainsi que de nombreux militants ont bien conscience de la nécessité pour le SPD d’en sortir, faute de quoi il sera difficile de retrouver une véritable crédibilité. Il n’en demeure pas moins que prendre l’initiative de la rupture est dangereux dans un pays qui place au premier plan le respect de l’engagement que représente un contrat de coalition entre deux partis. Pour écarter le risque de le payer électoralement, il est donc préférable de faire porter à l’autre parti la responsabilité de la rupture. Or la chance du SPD est que, précisément, le contrat de coalition signé fin 2017 prévoit la possibilité d’une révision à mi mandat soit…fin 2019. Les deux futur co présidents entendent donc profiter de cette opportunité afin de proposer une renégociation portant sur plusieurs points : la hausse du salaire minimal, la fin de la politique budgétaire excédentaire au profit d’investissements dans les services publics ou encore une politique climatique plus ambitieuse. Si la CDU-CSU accepte – scénario très improbable -, le SPD en retirera des bénéfices majeurs ; si elle rejette ce plan – ce qui est quasi certain-, les Sociaux Démocrates auront alors une bonne excuse pour sortir enfin de cette coalition électoralement mortifère pour eux.
Le SPD est il en mesure de gagner les prochaines élections ? Les sondages sont pour le moment désastreux mais on peut supposer qu’un départ de la GroKo ainsi qu’une ligne sociale démocrate plus assumée peuvent leur permettre de récupérer une partie de leur retard. L’idéal serait que la CDU gouverne quelques temps en minorité ce qui laisserait plusieurs mois au SPD pour se préparer aux échéances électorales. Un gouvernement minoritaire en Allemagne constituerait un scénario inédit mais la Chancelière Merkel peut être tentée de risquer le coup considérant qu’une élection anticipée sonnerait la fin de sa carrière politique, chose qu’elle ne souhaite sans doute pas précipiter.
Autre interrogation : le duo NoWaBo/Esken peut il rassembler le parti ? Comme on l’a vu, il n’a rien de véritablement radical mais la réaction de l’aile droite a été exceptionnellement virulente. Néanmoins, une scission apparaît à ce stade difficile à imaginer : quel serait l’espace politique d’un nouveau parti entre des Verts qui se sont recentrés, un FDP qui joue la carte libérale et une présidente de la CDU, AKK, plutôt sur une ligne centriste concernant les questions économiques et sociales ? Le principe de réalité devrait donc prendre le pas sur la frustration.
Pour l’Europe et plus particulièrement pour la France, la victoire du ticket social démocrate constitue une bonne nouvelle. En effet, la perspective d’un SPD qui relaiera en Allemagne le sentiment de plus en plus partagé sur le continent qu’il est nécessaire que Berlin cesse de bâtir des excédents inutiles aux dépens de ses voisins et lâche un peu la bride en matière d’investissements apparaît séduisante. Elle aura au moins le mérite de montrer aux Allemands qu’il existe une alternative au totem de la « Schwarze Nulle », dont l’abandon est par ailleurs déjà réclamé par l’ensemble des partenaires sociaux. Affaire à suivre….
Merci à S. Poupon pour cet article de fond sur la gauche allemande qui sauverait l’Europe. Pour le lambda que je suis, il est vrai que je m’en moque un peu actuellement où j’essaie de sauver ma peau dans la France Macron, à voir mon pouvoir d’achat d’une retraite -2000€ diminuer de jour en jour. J’aimerais bien un article sur Macron peut-il sauver l’Europe et surtout ses citoyens lambdas, les plus nombreux me semble-t-il merci. La RFA de Schröder et Merkel n’est pas l’eldorado auquel on essaie de nous faire croire, elle montre les conséquences de la révolution Macron: un taux de pauvreté passé de 14% à 17% comme en Espagne et au Portugal, des retraités qui retourne au travail à 70 ans…Merci!
Merci à S. Poupon pour cet article de fond sur la gauche allemande qui sauverait l’Europe. Pour le lambda que je suis, il est vrai que je m’en moque un peu actuellement où j’essaie de sauver ma peau dans la France Macron, à voir mon pouvoir d’achat d’une retraite -2000€ diminuer de jour en jour. J’aimerais bien un article sur Macron peut-il sauver l’Europe et surtout ses citoyens lambdas, les plus nombreux me semble-t-il merci. La RFA de Schröder et Merkel n’est pas l’eldorado auquel on essaie de nous faire croire, elle montre les conséquences de la révolution Macron: un taux de pauvreté passé de 14% à 17% comme en Espagne et au Portugal, des retraités qui retourne au travail à 70 ans…Merci!
…..quanT à la dérive…..et non « quand. à la dérive….
Schwarze Null et no n’an Schwarze Nulle
À ce compte-là, « qu’a été » et non pas « qu’à été ». 🙂
Plus sérieusement, ce changement en Allemagne devrait donc amener un changement en Europe, qui pourrait amener un changement en France…
Macron est probablement plus préoccupé par ce qui se passe en France, même s’il persiste, comme une espèce d’allumé irresponsable, en se prétendant « calme et déterminé », ce qui devrait soulager davantage l’élite qui l’a fait élire que les Français moyens qui se succèdent dans les mobilisations et les manifestations, sans parler des grèves, que par ce qui s’est passé en Allemagne.
Je partage l’essentiel de l’analyse de S Poupon, notamment quant aux relations avec la France ainsi que sur l’aspect budgétaire..
Maurice Guyader