A Valence, de futurs réfugiés climatiques ?

Le drame climatique sans précédent qui affecte villes et villages situés au sud-ouest de la ville de Valence, s’accompagne d’un bilan humain et économique considérable. Concentré principalement le long du Fleuve Turia et des autres cours d’eau qui dévalent des montagnes bordant la plaine de Valence, le cataclysme de mardi dernier pose à terme la question du futur des populations concernées. Populations prises au piège d’une urbanisation dessinée par le boom espagnol, autour de deux mots clefs : « bétonisation et agriculture de plus en plus intensive ». Le tout au mépris des sols et de la gestion de l’eau.

Plus largement, l’ONU s’attend à quelques 200 millions de réfugiés climatiques dans le monde d’ici 2050. Or, la tragédie de Valencia souligne hélas que l’Europe ne fera pas figure d’exception. Les rapports du Centre international de surveillance des déplacements internes répertorient régulièrement des populations déplacées de l’échelle d’une ville partout en Europe, et l’Espagne fait partie des pays les plus régulièrement frappés. Plus précisément encore, face aux conséquences du changement climatique, les côtes sont particulièrement en danger, devant faire face à des précipitations extrêmes dans un contexte général de montée des eaux. Dans la durée, ceci ne peut qu’accroître le risque d’inondations.

En France, à Lacanau, l’Atlantique devrait avancer de plus de 50 mètres d’ici 2050. Ce sont déjà plus d’un millier de logements et des centaines de commerce dont la relocalisation est envisagée plus à l’intérieur des terres. Au-delà de cas individuels de migrants climatiques, se pose donc la question de déplacer à terme des villes entières au sein de l’Union européenne. Loin de la plaisanterie de bâtir les villes à la campagne, l’Asie du Sud est s’y trouve déjà contrainte. L’Indonésie a créé sa nouvelle capitale, Nusantara, sur l »île de Bornéo.

Sur le long terme, le nombre de migrants climatiques intra-européens pourrait déstabiliser les économies locales et accroître les inégalités au sein de l’UE. Pourtant il n’existe aucun cadre juridique européen pour définir un réfugié climatique au sein de l’UE, alors qu’au niveau international, l’agenda de protection de l’initiative Nansen a bien été adopté à l’initiative de la Norvège et de la Suisse, mais ses mesures n’ont rien de contraignant et reposent sur une coopération internationale et une harmonisation des pratiques. Alors qu’une telle approche devrait être naturelle aux Européens, le sujet n’est pas non plus présent au sein du Budget européen en tant que tel. Le Fonds de Solidarité n’est pas à la hauteur de l’enjeu et il est également difficile de se cacher derrière la politique de cohésion en guise d’ambulance comme le suggère la proposition RESTORE publiée récemment. La question étant de savoir si le budget de l’UE pourra représenter une garantie « climate-proof » pour les citoyens européens. L’on parle ici de financer sur le budget européen une aide qui aille de la première urgence à l’éventuelle relocalisation définitive des citoyens et des entreprises.

Le green deal a jusqu’à présent beaucoup ignoré les victimes à venir au sein de l’UE du fait du réchauffement climatique, dans un débat qui semblait opposer des objectifs climatiques abstraits face à des revendications catégorielles et électorales, fortes bruyantes, voire violentes. Cet oubli a sans aucun doute facilité les dernières reculades au sein du Parlement européen sur le sujet, notamment concernant l’avenir des sols. A ce sujet, le président PPE de la région de Valence aura sans doute beaucoup à raconter à ses homologues du Parlement européen sur l’artificialisation des sols…

Henri Lastenouse
Henri Lastenouse
Vice-Président de Sauvons l'Europe

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1 COMMENTAIRE

  1. Bonsoir.

    Encore et encore, pourquoi n’avons nous pas une véritable gouvernance européenne ?

    Pourquoi n’excite t’il pas de puissantes structures d’intervention européenne pour aider à faire face à ces divers désordres, pourquoi n’y a t’il pas anticipation ?

    Seul, nous ne sommes rien, quand va t’on le comprendre ?

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