Un Nobel pour l’Europe: retour aux sources!

Enfin ! Si l’attribution du Prix Nobel de la Paix à l’Union européenne ce vendredi 12 octobre en a surpris certains, déçus d’autres, ou encore suscité les railleries des langues acerbes de certains britanniques eurosceptiques, les fervents défenseurs du projet européen, eux, sont à la fête. Mais cette liesse ne doit pas animer uniquement les milieux européens. Chaque citoyen européen doit, en effet, se sentir honoré par ce prix, qui met en lumière le chemin parcouru par tous, Etats comme individus, depuis bientôt soixante ans.

 

Car oui, qui eut cru, qu’après des siècles de déchirements au sein de nos territoires, nous réussissions un jour à faire nôtre la maxime « L’union fait la force » ? Après avoir connu les guerres fratricides, avoir vécu les pires horreurs dont l’être humain est capable, nous avons su tirer les leçons de nos erreurs et nous sommes engagés à reconstruire, et plus encore, à jeter ensemble les bases d’un nouvel ordre politique. Le comité Nobel a ainsi déclarer remettre ce prix à l’UE « pour avoir contribué pendant plus de six décennies à promouvoir la paix et la réconciliation, la démocratie et les droits de l’homme en Europe ». Il rappelle ainsi ce qui fait le ciment de la construction européenne : la recherche de la paix perpétuelle et le respect des droits de chacun. Les pères fondateurs Schuman, De Gasperi, ou encore Jean Monnet ont jeté les fondations d’une telle entreprise en rendant les pays européens interdépendants économiquement. En s’appuyant sur l’acier et le charbon, deux matières premières qui ont servi pendant des décennies les luttes intestines, ils ont tracé, symboliquement, la voix d’une nouvelle coopération. Si les États-nations s’étaient fondés sur l’opposition par le fer, un nouvel ordre politique reposant sur l’unité et la coopération devait voir le jour. Soixante ans après, le bilan est plus que positif. Si l’Europe a connu d’autres conflits (la guerre des Balkans, la fin de la Guerre froide), l’Union européenne n’a cessé de s’élargir et de se renforcer si bien que les citoyens européens font aujourd’hui abstraction du risque de guerre sur leur territoire. Cet acquis a tendance à être occulté, et si c’est là l’un des indicateurs de réussite du projet européen, il n’en reste pas moins vital de se souvenir de ce qui nous a poussé à nous unir.

 

Mais au delà d’un rappel au passé salutaire, ce prix Nobel de la paix doit nous pousser à regarder le présent et l’avenir. L’Union européenne traverse une crise sans précédent, la première de sa jeune histoire de formation politique. Là où certains veulent voir de l’ironie ou bien encore un certain cynisme du comité Nobel, nous devrions y voir un encouragement et une reconnaissance. Décerner le Nobel de la paix à l’UE, c’est reconnaître ce qu’elle a accompli jusqu’à maintenant, ce que des États et des citoyens ont accompli par la force de leur volonté. C’est aussi valoriser le projet politique et démocratique européen en tant qu’alternative à l’État-nation, ou plus exactement en tant qu’entité politique sans équivalent. Car oui le Nobel n’a pas été remis à l’Europe ou au Conseil de l’Europe, mais bien à l’Union européenne, en tant qu’organisation économique et politique. Vérification faîte, l’Union européenne est, en effet, la première organisation politique a obtenir une telle distinction. Entendons le message suivant : « Ne vous arrêtez pas en chemin, ne laissez pas l’Union européenne disparaître dans les tumultes de ce que vous avez combattu. » A l’heure où la crise financière et économique exacerbe les tensions sociales et met à mal la solidarité, le repli identitaire et nationaliste apparaît comme une planche de salut. Or c’est précisément ce que l’Union européenne a voulu combattre dès 1957. Nous avons voulu lutter contre les répétitions de l’Histoire, voyons en ce prix un encouragement à persévérer dans la voie que nous avons tracée. Acceptons aussi les crises, les échecs et les doutes, l’État-nation ne s’est pas fait en cinquante ans, laissons le temps à l’Union européenne de se construire…

 

Sauvons l’Europe de ceux qui voudraient oublier ce passé et railler ses acquis, faisons de ce Nobel un outil pour soutenir plus de fédéralisme ! Saisissons cette opportunité pour nous sortir de notre torpeur. Osons être fiers de l’Union européenne ! Osons continuer à encourager son développement. Revenons aux sources pour mieux bâtir l’avenir.

 

Valérie

Arthur Colin
Arthur Colin
Président de Sauvons l'Europe

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3 Commentaires

  1. Tout à fait en phase avec ce qui est écrit. Continuons à préserver ce que nos Anciens ont bâti: un lieu de paix, de démocratie, de bien-être et de respect du citoyen.L’Europe devrait être le 1er continent, par ses compétences économiques, intellectuelles, artistiques et sociales. Battons-nous contre ceux à qui cela fait de l’ombre. Oeuvrons pour une Fédération européenne d’États-Nations en osant abandonner certaines compétences nationales au profit de compétences fédérales: défense, politique étrangère, financière, environnementale, droits des citoyens etc. Nos enfants sont Européens de naissance. Moi, j’appartiens à une génération qui n’a jamais connu de guerre. Donc, je suis une Européenne convaincue, fière de l’être et malgré cette crise qui n’a pas pour origine notre continent ni notre monnaie, il faut empêcher les esprits chagrins à devenir majoritaires. Ce serait insultant et gravissime.

  2. De nouveau complètement d’accord. Avec cet ajout: moi qui ai connu la guerre avec pas mal de vissicitudes et péripéties, je suis très attentive à tout ce qui concerne l’Europe et qui nous regarde. Ah si on avait su en 1939! Et comme le sacrifice de Jaurès en 1914 nous paraît gros d’avenirs plus sereins…

  3. Au début des années 50, le souvenir de la guerre était encore très présent dans les mémoires de chacun. Les atrocités commises durant ces années de terreur, les discours haineux, les images vivantes de l’exode et de l’occupation, les privations… Tout cela n’était pas encore évacué des esprits, loin de là, et revenait très régulièrement dans les conversations. Et presque dans le même temps, alors que Jean Monnet et quelques autres prêchaient pour une paix durable et organisée, de premières tentatives timides de contacts individuels se dessinaient entre Français et Allemands. Ce n’était rien, mais pourtant cela montrait déjà qu’un jour, les citoyens aussi décideraient que la paix serait leur bien commun et l’une de leurs raisons de vivre, ensemble.
    À chaque fois je passe la frontière allemande, en débarquant dans un aéroport, en filant sans m’arrêter à l’un des anciens postes-frontières, en traversant la ligne à pied sur un petit chemin frontalier… Je suis saisi d’un grand bonheur. Ce bonheur, je le souhaite à tous ceux qui me liront, et je forme le vœu qu’il devienne dans les années à venir, de part et d’autre, le plus naturel des bonheurs quotidiens. C’est pour cette raison que j’ai créé le page http://www.facebook.com/AmitiesFrancoAllemandes . Pour cela aussi, il faut renforcer considérablement notre Union, il faut nous unir encore davantage, c’est-à dire nous fédérer. Ce n’est qu’à ce moment-là et à ce prix que tout risque sera définitivement écarté. Nous en sommes proches, persévérons.

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