L’Europe tenait une chance rare de fédérer les efforts mondiaux pour l’aide internationale. Alors que les Etats-Unis d’Amérique se retirent avec fracas de la solidarité internationale, l’Europe apparaissait comme le relai naturel cette action. Il ne s’agissait pas naturellement de combler le vide financier laissé par les américains, mais l’Europe était idéalement placée pour être le cœur des efforts de réorganisation et de rationalisation de l’aide humanitaire. Notre engagement indiscutable nous y prédisposait, et il faut bien dire que nous maîtrisons les questions d’organisation, faute de faire voler bombardiers et chasseurs supersonique par de claires nuits d’été.
La quatrième conférence des Nations Unies, qui se tiendra à Séville du 30 juin au 3 juillet, était le moment idéal pour affirmer le leadership européen sur un sujet qui porte l’héritage de Willy Brandt et tant d’autres figures ayant incarnées l’hémicycle strasbourgeois.
Or, les manœuvres du PPE ont transformé l’exercice en Bérézina, avec le rejet du rapport d’initiative sur le financement de la politique de développement, justement présenté en vue de cette quatrième conférence des Nations Unies. Cet échec parlementaire inédit de la politique du développement est dû à une alliance officieuse, mais désormais fort rodée entre le Parti populaire européen (PPE) et les trois groupes d’extrême droite siégeant dans l’Hémicycle. Initiée par le PPE pour bénéficier d’un contrepoids ponctuel sur le Green Deal, cette alliance met aujourd’hui directement en péril les valeurs fondatrices de l’UE.
Ainsi, cette résolution portée par le libéral luxembourgeois Charles Goerens a été rejetée par 340 voix contre, 282 pour et 26 abstentions. 12 membres mis à part, le groupe PPE a voté comme un seul homme avec le groupe souverainiste des Conservateurs et réformistes européens (ECR), celui de l’extrême droite des Patriotes pour l’Europe, où siège le RN, et celui d’extrême – extrême droite de l’Europe des nations souveraines (ESN) où siège l’AFD allemande, première opposition au chancelier allemand actuel. Ceci contraste avec les gouvernements européens, qui dans le même temps ont adopté leur position sur la conférence de Séville à l’unanimité en soutenant les positions historiques de l’Europe sur les droits humains et l’action climatique.
Ainsi, une nouvelle fois l’otage des rancœurs personnelles du leader PPE Manfred Weber, le Parlement européen est pour la première fois de son histoire, non seulement moins ambitieux que les gouvernements européens, mais surtout sans position du tout… Pire, l’assemblée de Strasbourg démontre à nouveau qu’elle a de facto perdu toute majorité en son sein sur les questions comme les valeurs de l’UE ou le défi climatique. Il devient urgent qu’une motion de censure clarifie quelle est la vraie majorité qui fait la loi à Bruxelles !
Le PPE s’égare….
… au point d’accréditer, en effet, le risque que le deuxième « P » du sigle ne dérive vers la connotation de « populiste » plutôt que de « populaire ».
Le Parlement européen est le reflet de la montée de l’extrême droite partout en Europe. Il est aussi le reflet de l’alliance entre droite et extrême droite que l’on peut constater dans la grande majorité des pays de l’Union. Cette montée et cette alliance ne sont pas une fatalité, mais le produit d’une gauche qui a complètement perdu ses repères historiques depuis plus de quarante ans. Cette gauche doit se refonder sous peine de mourir de sa belle mort. L’exemple espagnol, malgré toutes les difficultés, résiste à l’alliance PP-Vox. Elle devrait nous montrer la voie. Au lieu de cela, les gauches européennes se déchirent et l’Espagne paraît bien isolée dans le paysage européen.
Donc, c’est déjà limpide, pas besoin de motion de censure : l’extrême droite gouverne déjà l’Europe, grâce à Manfred Weber et à tous ces idiots du PPE (y compris la présidente de la Commission). Récemment paru (mai 2025), un excellent livre de l’historien français Johann Chapoutot, « Les Irresponsables – Qui a porté Hitler au pouvoir ? » (nrf essais, Gallimard) revient à point nommé sur les certitudes béates de Franz von Papen en 1932. En Europe, faute d’avoir encore osé en appeler au peuple pour établir un régime vraiment démocratique, nous serons « pris au dépourvu lorsque la bise sera venue ».
Cessons de procrastiner en nous contentant toujours et encore de demi-mesures et en nous rassurant aveuglément à coup d' »Eurobéatomètres ». Osons nous exprimer haut et fort. Il y a longtemps que l’eau tiède n’a plus besoin d’être inventée. Un État démocratique européen, fédéral par nécessité, vite !
Je ne suis pas du tout certain que l’appel au peuple que vous évoquez débouche sur l’issue démocratique que nous espérons tous
Nous assistons à un véritable désastre. L’Europe n’est plus qu’un lamentable radeau de la Méduse balloté par les flots rugissants de pays qui n’ont plus rien à faire dans l’Europe au sens strict du terme, de ses valeurs fondatrices. Sans une refondation complète et totale de cette institution tout est fichu et ce n’est même plus la peine de faire semblant de continuer.
Je ne comprends pas comment la Hongrie peut encore faire partie de cette « famille » ! Je suis sidéré de voir que certains pays piétinent les valeurs européennes mais qui continuent à tendre la sébille ! C’est intolérable !
Il faut que ça cesse ! Il faut redéfinir les règles d’appartenance au « club ». Tant que l’on n’aura pas effectué ce travail rien de concret ne sera possible. J’étais un européen convaincu mais là la colère m’étouffe ! Stop à l’hypocrisie ! Marre de payer pour des institutions incompétentes et inutiles pour financer des pays qui vous trainent dans le lisier !
Réveillons-nous ! Une Europe oui, mais une Europe efficace qui a le courage de couper ses membres gangrainés !
La vocation d’une boussole étant d’indiquer une orientation sur un chemin, Le Parlement européen serait donc non seulement sans voix, mais aussi… sans voie.
En fait de boussole, on se souviendra du recours à cette référence instrumentale lorsque, le 22 mars 2022 (soit un mois après le déclenchement du conflit russo-ukrainien), le concept de « boussole stratégique » a fait son apparition dans la boîte à outils au service des dirigeants européens pour définir le positionnement de l’UE face aux tensions géopolitiques internationales.
Pour ce qui est du Parlement européen, je ne suis pas un nostalgique du « c’était mieux avant »… mais force est de reconnaître qu’en matière de coopération au développement – une politique à la mise en œuvre de laquelle j’ai été associé durant 26 ans au sein de la Commission européenne jusqu’au seuil de l’an 2000 et au sujet de laquelle je continue de témoigner aujourd’hui dans un cadre universitaire – le « souffle » du Parlement européen était à cette époque autrement plus dynamique. Par exemple, entre 1994 et 1997, le président de la commission du développement et de la coopération de l’assemblée européenne a été à l’époque un certain Bernard Kouchner, dont on connaît les engagements humanitaires – et cette instance comptait par ailleurs parmi ses membres une humble mais solide pointure comme le communiste Francis Wurz, pour ne citer que deux parlementaires français.
Pour en revenir à l’article d’Henri Lastenouse, l’épisode qu’il rapporte me fait penser au dessin publié dans un album de Philippe Gelück, où ce dernier fait dire à son célèbre « Chat »: « trop de tiers-mondistes ne sont que des demi-mondains »…
Plutôt que d’attendre un très improbable alignement des planètes qui, un beau matin, ferait de notre Europe un Etat supranational fédéral souverain vis-à-vis du reste du monde, apte à tenir à bonne distance les « superpowers » continentales qui ne lui veulent pas que du bien, ne serait-il pas grand temps de se relever enfin les manches afin de faire adhérer l’opinion publique à ce dessein rationnel? Ou bien sommes définitivement dans l’ère de « la déchéance de rationalité », titre du livre de Gérald Bronner?
Bonjour.
Nous sommes tous coupables de cette situation, oui Monsieur VOLPI, il serait temps de se relever les manches pour se battre pour ce dessein rationnel, soyons lucide, beaucoup d’entre nous pensons la même chose, mais nous ne sommes pas dans l’action, nous constatons, l’opinion publique est comme vous et moi, il manque l’impulsion pour la fédérer, SAUVONS L’EUROPE doit-elle rester sur sa réserve en continuant de tourner en rond ?
Personnellement, j’attendais autre chose d’elle, je m’y retrouve de moins en moins.