Que reste-t-il du pacte républicain lorsque les enfants les plus fragiles sont traités comme de simples variables d’ajustement budgétaire ?
Chaque jour, partout en France, des milliers de jeunes placés sous la tutelle de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) subissent la violence d’un abandon institutionnel. Une violence qui s’ajoute à des souffrances psychiques, affectives et émotionnelles déjà trop lourdes à porter.
Nous le constatons, à regret, jour après jour : notre République ne parvient plus à protéger ses enfants. C’est une tâche sur notre idéal, une honte nationale, et un échec collectif majeur.
Dans de trop nombreux départements, la situation est alarmante.
Dans mon département du Nord, des enfants dorment à l’hôtel, seuls, sans encadrement. D’autres sont ballottés de structure en structure, parfois sans projet éducatif cohérent, livrés à eux-mêmes.
Les professionnels de terrain — éducateurs, assistants familiaux, travailleurs sociaux — que je tiens une nouvelle fois à saluer pour leur engagement remarquable, sont aujourd’hui désespérés et démunis face à des situations dramatiques, trop souvent sans appui réel ni soutien institutionnel.
Depuis des années, ils subissent la détérioration de leurs conditions de travail, un manque criant de reconnaissance, des moyens insuffisants, et une absence de considération pour leur action pourtant essentielle.
Les flagrantes inégalités territoriales sapent les fondements de notre promesse républicaine
Je refuse d’accepter qu’un enfant vulnérable soit traité différemment selon le département dans lequel il est né ou réside. Cette injustice est indigne d’un État qui se veut protecteur.
C’est pourquoi je défends depuis longtemps l’idée que la protection de l’enfance doit devenir une politique régalienne de l’État.
Les départements, malgré les efforts réels de certaines majorités volontaristes, ne sont pas armés pour répondre seuls à l’ampleur des besoins. Il faut une vision nationale, cohérente, structurée, et à la hauteur des enjeux.
Je plaide pour une mobilisation totale de l’État, appuyée sur des mesures fortes :
- Un plan national d’accompagnement à la parentalité, pour prévenir les situations de placement.
- Le recrutement massif et la revalorisation des assistants familiaux, dont nous manquons cruellement.
- La création d’un véritable Service public de la petite enfance, doté de moyens humains et financiers à la hauteur des besoins.
- Des contrôles renforcés pour prévenir les maltraitances et les défaillances dans les structures d’accueil.
Mais au-delà du cadre national, l’Union européenne a également un rôle à jouer.
Elle ne peut rester spectatrice alors que des enfants, sur l’ensemble du continent, vivent des situations d’abandon institutionnel.
L’Europe doit devenir un acteur concret de la protection de l’enfance
Elle pourrait impulser la création d’un socle commun de droits et de garanties pour tous les enfants protégés, imposé à l’ensemble des États membres, et assorti d’un mécanisme de suivi et de contrôle pour en vérifier l’application effective.
Notre République, fidèle à ses principes, doit faire face à cette crise avec lucidité et détermination.
Et l’Union européenne, si elle veut incarner autre chose qu’un simple marché économique, doit se montrer à la hauteur de sa promesse, de ses valeurs et de son idéal.
Protéger les enfants, c’est protéger notre avenir commun.
Il n’est plus temps d’attendre. Il est temps d’agir.