Paradis fiscaux : le Parlement demande au Conseil d’arrêter de se moquer du monde

Les pays de l’Union Européenne perdent environ 20% de leur impôt sur les sociétés dans les paradis fiscaux. C’est beaucoup. Les tentatives européennes pour remédier à cet état de fait se sont pour l’instant heurtées à l’unanimité requise auprès des Etats en matière fiscale. Il suffit donc que quelques pays, Belgique, Luxembourg, Pays-Bas, Malte en particulier, bloquent tout processus pour que les trous noirs européens persistent.

Tout ceci se double d’une comédie de mauvais goût. L’Europe s’est dotée d’une liste noire des paradis fiscaux, qui a pour principale propriété que personne ne s’y trouve. Aucun membre de l’Europe bien sûr, c’est la règle du jeu bien que l’essentiel du problème soit là. Mais les autres paradis fiscaux non plus. Les Etats ont tant négociés cette liste entre eux selon des paramètres diplomatiques, que fait rare, Pierre Moscovici, Commissaire à l’origine de la liste, s’en était publiquement désolidarisé et avait rejeté toute responsabilité sur les gouvernements nationaux.

Où en sommes nous ? Les gouvernements européens, au sein du Conseil, se sont créés un petit groupe informel et un sous-groupe qui travaille à l’établissement de cette liste. Sur quels critères ? Qui décide quoi ? Quels pays portent quelle décision ? On en sait rien. Il paraît que les institutions européennes c’est la technocratie et seule la réunion des gouvernements nationaux peut sauver l’essence de la démocratie. Ce type d’exemple permet plutôt d’en douter.

Mais les députés européens sont en colère. Ce processus opaque aboutit à ce que les Iles Caïman disparaissent de la liste. Les impôts pour les sociétés y sont toujours à 0%, mais les autorités ont concédé quelques références diplomatiques non engageantes à une transparence accrue. Considérant qu’on va un peu loin dans la pantalonnade, les élus européens posent publiquement quelques exigences désagréables.

En premier lieu, la transparence : comment fonctionne ce sous-groupe qui s’est plus ou moins arrogé le rôle d’écrire cette liste des paradis fiscaux ? Qui porte quelle position en son sein ? Le secret sur les délibérations n’est pas de nature à rassurer les citoyens.

Ensuite la relation avec les élus européens : le Parlement réclame un siège à table, et que quelqu’un consente à venir lui parler et répondre aux questions des députés.

Ajoutons-y une demande de rigueur : mettre en place des critères clairs et efficaces. Des pays qui pratiquent un taux de 0% sont des paradis fiscaux et doivent figurer sur cette liste, par exemple.

Enfin un coup de canon : Les pays européens ne peuvent par principe être exclus de cette liste. Ils représentent bien un tiers de l’évasion fiscale mondiale, l’Union européenne se ridiculise en ne faisant pas même mine de s’y intéresser.

Ce n’est qu’une résolution, c’est à dire un coup de gueule. Mais il est bienvenu et il est sain que le Parlement rappelle qu’il est vigilant quant à l’action des autres institutions européennes. La démocratie est aussi dans ce dialogue.

Arthur Colin
Arthur Colin
Président de Sauvons l'Europe

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8 Commentaires

  1. Des artisans et PME du Nord ont été victimes d’un comptable escroc ayant placé ses « gains » dans les paradis fiscaux européens… le procès traîne – les victimes dépensent continuellement pour le procès et ne seront jamais indemnisés… Où est la justice ?

  2. S’il est clair que le parlement dans sa diversité peut encore représenter quelque chose aux yeux d’un électeur européen, le reste est de la fumisterie. A l’instar de l’oligarchie pseudo démocratique française où l’on se sert et on sert les amis, les électeurs étant vus comme des demeurés voire des cons car ils n’ont pas compris le « jeu » politique qui n’est que théâtre d’ombres !

  3. la fraude, l’evasion, l’optimisation (aggressive, non aggressive) fiscale porte en large partie sur les benefices des societes. Les montages fiscaux qui occupent des milliers d’experts comptables, de cabinets d’audit et de contrôleurs fiscaux dépendent d’une part de ces fameuses listes noires ou grise de territoires paradisiaque et d’autre part des disparités fiscales entre etats membres.

    Pourquoi pas supprimer totalement l’impôt sur les bénéfices?

    On parle de harmoniser? Alors harmonisons

    Un tantinet rock n’roll pour certains? Regardons de plus près :
    1-Au bout du bout de la chaîne des dividendes et des prix de transferts il y a toujours une personne physique. Si cette personne réside sur le territoire européen il est imposé sur le revenu. Dans le cas contraire : exit tax.
    2-Laissons les actionnaires arbitrer entre profits, mise en reserve et remuneration des dirigeants.
    3- Laissons les entreprises décider de leurs amortissements en fonction de critères économiques et non pas en fonction de critères fiscaux de déductibilité.
    4- oublions même les travaux sur l’assiette fiscale, usine a gaz qui a occupé tant d’experts de l’OCDE et même du Parlement Européen
    Bref, pour se premunir de l’evasion, Simplifions!

  4. Des coups de gueule comme celui-là il en faudrait beaucoup de la part du Parlement. Je sui un peu dubitatif quant au résultat mais c’est toujours ça…

  5. Comment voulez-vous que les citoyens de l’Europe adhèrent à l’idée d’une Union Européenne plus forte et plus juste. Telle qu’elle fonctionne cette Europe, elle devient répulsive, les gens ont de plus en plus envie de la quitter, comme les Anglais, …et je ne parle pas du cafouillage sanitaire avec la vaccination.
    Je vois trois enjeux majeurs où l’UE devrait agir et vite, maintenant, tout de suite…1/les impôts et la Finance 2/ l’écologie où on ne fait que parler sans rien faire de décisif au niveau de l’énergie, du recyclage, et de la baisse de la croissance (donc en cessant la publicité qui pousse à consommer) toutes choses urgentes à mettre en oeuvre (on aurait dû commencer il y a 30 ans, quand on parlait déjà exactement de tout ce qui se dit aujourd’hui)
    et 3/ la santé et la surveillance biologique pour une politique concertée dans ce domaine.
    Pour tout cela les votes à l’unanimité, c’est zéro c’est faire du surplace, c’est l’immobilisme programmé, c’est pain béni pour le Capital mondial…
    Arthur, avez-vous encore vos illusions sur les chances de l’Europe? Moi non. De moins en moins et dieu sait que j’ai eu de l’enthousiasme pour ce grand projet humain….elleest où la belle humanité ?

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