La longue marche de la politique étrangère européenne

Beyrouth, Mali, Biélorussie, Libye, Méditerranée orientale… L’été a été particulièrement chaud aux frontières de l’Europe, montrant une fois de plus à la fois l’urgence et la difficulté à nous doter d’une politique étrangère et de défense commune.

Depuis plusieurs années déjà l’Europe est confrontée à un environnement de plus en plus dangereux et instable. Cela est dû au cocktail explosif que forme la combinaison d’une bonne quantité d’« Etats faillis », comme la Libye, le Liban, la Syrie ou encore le Mali et des régimes autoritaires comme la Russie et la Turquie, rêvant de rétablir des empires disparus, qui profitent de ce désordre pour étendre leur emprise sur le pourtour de l’Union.

Et cela dans un contexte où la solidarité entre l’Europe et les Etats-Unis s’affaiblit. L’affaire ne date pas de Donald Trump : la faille a commencé à s’élargir avec la guerre d’Irak en 2002. Barack Obama ne l’avait pas comblée ensuite, en particulier lorsqu’il refusa d’intervenir en Syrie. Et cet éloignement devrait se poursuivre quel que soit le prochain président : les tensions internes sont telles aux Etats Unis que l’isolationnisme continuera probablement à dominer la politique extérieure américaine.

Ce paysage dangereux était déjà en place avant l’épidémie de Covid 19, mais celle-ci a beaucoup aggravé les choses. Elle a multiplié les difficultés des « Etats faillis » comme on l’a constaté au Liban, au Mali ou en Libye. Elle risque aussi d’en ajouter de nouveaux à la liste de ceux qui jalonnent nos frontières : les difficultés de la Biélorussie après l’élection présidentielle truquée de début août sont pour une bonne part un contrecoup de cette crise et l’Algérie, très affectée elle aussi, pourrait à son tour être déstabilisée. La crise du Covid 19 a également entraîné de graves difficultés en Russie et en Turquie. Avec une conséquence classique : leurs dirigeants misent sur une agressivité accrue à l’extérieur pour compenser leurs déboires intérieurs auprès de leur opinion publique. D’où les escalades en Libye ou en Méditerranée orientale.

Dans ce contexte que peut faire l’Europe ? Elle se tire au bout du compte plutôt moins mal que d’autres du Covid-19. Dans un premier temps l’Union a certes échoué à coordonner les réactions des Etats faute de compétences dans le domaine de la santé, mais par la suite les mesures fortes prises partout ont permis de ramener l’épidémie sous contrôle même si la menace d’une deuxième vague persiste. Tandis que le modèle social européen faisait la preuve de son utilité en permettant à la fois de soigner l’ensemble de nos concitoyens dans des conditions acceptables, de sauver les emplois et de maintenir les revenus de la plupart d’entre eux. Les instances européennes, que ce soit la Banque centrale, la Commission ou le Conseil, ont réagi beaucoup plus rapidement et puissamment qu’en 2008-2010 et l’accord conclu en juillet dernier sur un plan de relance d’une taille significative marque un saut qualitatif en matière de solidarité interne. Le contraste est flagrant avec le désastre américain dans la gestion du Covid-19 mais aussi avec les difficultés rencontrées par de nombreux pays émergents. Cela devrait se traduire par un renforcement de la position de l’Europe dans le monde.

Est-ce que cela va donner pour autant à l’Europe une capacité plus grande à maîtriser et sécuriser son environnement ? Cela ne semble pas évident dans l’immédiat. Les négociations difficiles autour du plan de relance en juillet dernier se sont notamment soldées aux dépens des moyens à consacrer dans le futur à la politique extérieure de l’Union et à sa politique de défense. Par ailleurs le départ des Britanniques de l’Union la prive d’une des deux seules armées capable de se déployer au-delà de ses frontières, d’une des deux puissances nucléaires du continent et d’un de ses deux membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Enfin, la politique extérieure européenne reste toujours largement paralysée par les divisions intraeuropéennes et la règle de l’unanimité qui continue de s’appliquer dans ce domaine. On le mesure en Libye où la France et l’Italie s’opposent et se neutralisent mais aussi dans l’Est de la Méditerranée où la Grèce et Chypre obligent l’Union à s’aligner sur des positions qui empêchent toute négociation avec la Turquie. Bref, comme dans les autres domaines, seule une crise extérieure majeure permettra probablement de débloquer la situation en la matière.

[author title= »William Desmonts » image= »http:// »]William Desmonts est un vieil ami de Sauvons l’Europe[/author]

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2 Commentaires

  1. Excellent article de la Propagandastaffel ! Action coordonnée contre le Covid=0; solidarité avec l’Italie=0; solidarité avec la Grèce=0; distribution éhontée d’argent au fou islamique Erdogan pour un résultat=0; interdiction des bateaux des ONG et interdiction de financement et d’opération=0. Umglaublich…

  2. Cette Europe détruit les peuples et la cohésion nationale en France….elle appauvrit les classes moyennes et les plus fragiles , bref, elle sert des intérêts supra nationaux qui sont enfermés dans une doctrine Ultra libérale…….. depuis Maastricht, cette construction européenne à fait prospérer l’ultra nationalisme tout en facilitant les mouvements migratoires pour imposer à l’ensemble des peuples une poperisation des salaires et des politiques sociales……
    Si c’est cela le progressisme europeiste, et bien méfions nous des conséquences directes de cette idéologie destructrice sur les individus……
    Pour ma part , il est urgent de stopper cette aberration et de repenser une union des peuples européens qui integrerait la Russie afin de neutraliser l’ingérence Américaine sur notre continent…..

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