À quand des assises de l’Europe participative ?

Quelle part l’Europe fait-elle à ses citoyens ? Cette interrogation sur la légitimité et la lisibilité du projet Européen hante nos démocraties, voire les dynamite dans le cas du Brexit britannique. Interrogation qui sera plus que jamais d’actualité pour la nouvelle Commission Von der Leyen dont le succès va dépendre de l’adhésion des citoyens au contenu même des politiques mises en œuvre dans les cinq ans à venir.

Avec la question climatique, destinée à dominer l’agenda, des choix de sociétés affectant directement nos modes de vies seront élaborés au niveau européen. Ils devront, de par leur nature même, faire l’objet d’un très large consensus citoyen, d’autant plus que la présidente Von der Leyen insiste : Je veux que le Green Deal européen devienne la marque de fabrique de l’Europe.

Or, s’il existe bien des opinions publiques convergentes en Europe, en premier lieu sur la question du climat, il faut rester plus prudent sur la réalité à ce jour d’une démocratie européenne active, d’autant plus que qu’une majorité de médias ont depuis longtemps abandonné toute ambition pédagogique sur la question. De plus, il n’est pas certain que le mercato européen de juillet dernier ait contribué à établir aux yeux des citoyens un lien lisible et direct entre leur vote et le nouvel exécutif européen ; cela malgré les quelques scalps de Commissaires européens retoqués par un parlementarisme européen qui s’affirme. De fait, les joutes en huis clos entre leaders européens pour le partage du pouvoir avaient surtout un goût d’ancien monde, en décalage manifeste avec bien des innovations récentes en matière de participation active des citoyens à la gouvernance publique qui conjuguent aujourd’hui transparence et participatif.

Ce retard en matière d’innovation démocratique interpelle d’autant plus que l’Europe a représenté en son temps une formidable innovation politique, aussi bien dans ses objectifs que dans sa manière de faire. Mais, aujourd’hui, l’innovation politique se trouve souvent ailleurs en Europe. Par exemple du côté de la communauté germanophone de Belgique : cette dernière vient d’installer des institutions participatives inédites s’organisant de manière tripartite, autour d’un conseil citoyen, d’une assemblée citoyenne et d’un secrétariat permanent. En France, la Convention citoyenne pour le Climat permet aux citoyens de faire des suggestions sur les politiques destinées à assurer la transition énergétique. Au niveau Européen, le chantier du participatif pourrait aborder la possibilité d’une telle assemblée participative à Strasbourg, la mise en place de budgets participatifs ou encore le financement d’un lobbying participatif ouvert à tous. Il faudrait aussi définir le rôle exact des élus locaux et des territoires dans la mise en œuvre de cette innovation démocratique. Déjà, la ville de Rennes consacre annuellement 3,50 M€ à son budget participatif. Le terrain européen n’est pas tout à fait vierge, car existent déjà une Commission des pétitions au Parlement européen et un dispositif d’Initiative citoyenne auprès de la Commission Européenne.

Dès janvier prochain, le nouveau Parlement européen et la nouvelle Commission de Madame Von der Leyen devront ensemble faire partager leurs ambitions à 500 millions d’Européens. Cela demande d’explorer la mise en place d’un pacte participatif européen qui donne corps à une véritable souveraineté partagée. Une fois passées les humeurs du moment, il sera peut-être temps, chers Parlement et Commission européenne d’oser des Assises de l’Europe participative !

Texte publié dans Ouest France le 11 décembre 2019

[author title= »Yohann Abiven, Alberto Alemmano, Arthur Colin, Henri Lastenouse, Stefan Seidendorf, Jérôme Vignon » image= »https://www.sauvonsleurope.eu/wp-content/uploads/2018/09/logo-initiales-SLE.png »]Dr. Yohann Abiven, politologue, Pr. Alberto Alemmano, chaire Jean Monnet en droit Européen HEC ; Dr. Arthur Colin, vice-président de Sauvons l’Europe, Henri Lastenouse, Président de www.wesign.it ; Dr. Stefan Seidendorf, Directeur adjoint de l’Institut franco-allemand Ludwisbourg, Jérôme Vignon, directeur honoraire à la Commission européenne.[/author]

 

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3 Commentaires

  1. Comment participer, entre des gens qui ne se comprennent pas, la censure restera toujours dans les esprits, la diversité des langues parlées en Europe est une frontière virtuelle qu’il faut abolir ! Exigeons un référendum pour le choix d’une langue commune officielle. L’UCEF fera campagne pour le choix du Français !

  2. La foutaise de l’action climatique ne passe pas, les préoccupation du peuple européen sont tout autre ! Fausse monnaie injectée par la BCE, licenciements massifs dans l’automobile en Allemagne, Italie, France, Islam en pleine ascension, immigration massive musulmane non consentie, traités iniques ( Marrakech) signés dans le dos des peuples, ostracisme idiot envers la Russie, OTAN dégénéré. Voilà une liste à la Prévert qui renvoie vos considérations au classement vertical.

    • Absolument !

      Conséquence d’une « union » flanquée de « dirigeants » hors sol, guidés par la « Bible de Lisbonne », coupés des populations et de leurs problèmes essentiels et « conseillés » par tous les lobbies de multinationales qui les submergent.

      Et tant qu’à parler de protection de l’environnement, au lieu de se consacrer d’abord à cette lubie de « réchauffement climatique anthropique », « l’union » ferait bien de remettre en cause d’urgence la dictature avide de la finance et du business, qui entraîne les peuples dans une spirale mortifère de production, consommation, gaspillage, pauvreté, précarité, production de déchets, pollution, épuisement et destruction des ressources, des écosystèmes, des sociétés et des individus.

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